ANAMORPHOSES

Longtemps mes dessins ont tourné autour de cette dualité et de ce trouble dans une espèce de dialogue intime, à la recherche de la compréhension du phénomène qui fait qu'un cube dessiné en deux dimensions peut devenir morphologiquement un cube en trois dimensions. Et cette recherche arrivait à un moment ou mon oeuvre avait besoin de quelque chose de nouveau qui puisse en même temps être une synthèse et dire autrement ce que je voulais dire.

"Car qu'est-ce qui pourrait me représenter mieux qu'un cube anamorphosique, c'est-à-dire, un espèce de cube ouvert, un contenant, dans lequel il n'y a rien, un contenant vide."

Moi, quand je regarde l'anamorphose terminée, elle me fait physiquement rire... Le rire est une réaction devant ce qui tout à coup prend de la dimension et met face à un volume auquel on ne s'attend pas. Ça me rappelle le conte japonais ou chinois de ce peintre qui peint la mer ou un fleuve ; ensuite il peint une barque, et il disparaît dans le paysage... C'est exactement la même chose. Je fais cette forme, et tout d'un coup je suis pris dedans, je suis pris dans cette dimension qui change. Alors je ris comme si on me racontait une très bonne histoire.
Il y a là un effet d'optique qui se produit et ça devient tout autre chose, avec une autre direction dans l'espace, et après, ça va de plus en plus vite, ça va d'une forme à l'autre. C'est un mouvement involontaire qu'on ne peut pas contrôler. On est pris dedans, c'est ce que j'appelle le
cul de sac de l'anamorphose, et puis on en sort.

 Finalement, c'est comme ça que ça se passe dans la vie, la variation de perception des choses et des êtres, tout ce qui peut se produire dans une même journée, dans un même instant

 

                                                   


Lorsque, après avoir découvert les Villes orientales qui leur  font face, on aborde les trois pièces de la série des Anamorphoses, réalisées à Narbonne entre 2005 et 2008, on comprend qu’il s’agit là d’un degré d’abstraction supplémentaire pour dire, par le moyen des œuvres broyées ou lacérées, le vertige, l’enfermement, l’impasse de ce nouveau millénaire.
Par un travail sur la perspective, ces masses mobilesdans l’espace offrent au regard des effets d’optique surprenants qui aboutissent à une sorte de mouvement perpétuel. « Ce mouvement et cette incertitude dans le jeu des formes, voilà ce qui
oblige à voyager, à dialoguer, à questionner sans répit ».